Sutemi et Nihon Tai-Jitsu
Les sutemi sont des projections par sacrifice de son propre équilibre, c’est à dire que le défenseur qui exécute le sutemi chute en entrainant l’attaquant dans sa chute.
Notre école, le Nihon Tai-Jitsu, telle que structurée par Roland Hernaez Sensei, comporte l’étude de nombreux sutemi issus à la fois du Judo (enseignement de Mikinosuke Kawaishi sensei) et de l’aïkido Yoseikan (enseignement de Jim Alcheik Sensei et Minoru Mochizuki Sensei). Ce sont des techniques qui restent réservées à des pratiquants de niveaux supérieurs. Elles ne sont jamais utilisées en première intention en situation d’auto-défense : ce sont des techniques de « dernière chance », utilisables dans des situations où le défenseur n’a plus d’autre choix que de sacrifier son équilibre pour entrainer son agresseur dans sa chute.
Du point de vue Budo, la pratique des sutemi est importante : elle permet de parfaire la perception de son propre corps dans l’espace (dans des positions improbables !) et la précision de son placement par rapport à l’axe de rotation ainsi créé autour duquel le partenaire va être projeté. Les sutemi permettent un travail de recherche de haut niveau tout au long de sa vie, de se surpasser et d’affiner sa technique avec pour objectif ultime l’excellence.
Sutemi et auto-défense
Comme il s’agit de technique de sacrifice, il est logique que le défenseur ne les utilise que quand il ne peut pas faire autrement. Il semblerait totalement illogique de se jeter par terre pour se défendre s’il est possible de rester debout ! Les sutemi en auto-défense restent donc la toute dernière sortie de secours s’il n’est plus possible de faire autrement… Il faut garder à l’esprit que ce sont des techniques extrêmement efficaces mais très dangereuses pour l’adversaire qui va chuter sans que sa chute puisse être amortie par le défenseur. De plus souvent (pour les sutemi dont l’axe de rotation est au dessus de la ceinture) le défenseur amortit sa propre chute en « tombant » sur l’agresseur ce qui ajoute un choc supplémentaire à l’agresseur.
Pédagogiquement ?
Cette famille particulière de projection doit être enseignée de façon très progressive et uniquement à partir du moment ou le pratiquant maitrise correctement ses chutes (ukemi waza).
Dans l’école de Nihon Tai-Jitsu le pratiquant doit connaître quelques sutemi très simples pour son examen de ceinture verte, puis au fur et à mesure des années de pratique, les sutemi de la 4ème série de base et enfin les sutemi du Nihon Tai-Jitsu no kata Godan.
Sutemi-No-Kata (kata personnel)
Les sutemi présentés dans cette vidéo sont des sutemi supérieurs issus de l’école d’Aikido Yoseikan de Minoru Mochizuki Sensei. Ils sont toujours enseignés à Shizuoka (Japon), dans l’ancien Hombu dojo du Yoseikan, par l’un de ses assistants, Terumi Washizu Sensei fondateur du Gyukushin Ryu Aikido, auprès de qui j’ai la chance de perfectionner ma pratique des sutemi depuis 2006.
J’ai sélectionné et compilé 8 sutemi sous forme d’un kata personnel que j’ai conçu et présenté pour mon examen de 5ème dan Nihon Tai-Jitsu de la Fédération Française de Karate. Ils sont présentés de manière statique sur une seule attaque conventionnelle (Nukite à la gorge) de façon à en faciliter l’étude. Face à cette attaque, le défenseur va exécuter les 4 esquives (tai-sabaki) fondamentales (arrière, latérale, avant et circulaire) à l’extérieur puis à l’intérieur et se défendre par une technique qui va être contrée par l’attaquant. C’est sur le contre de l’adversaire que le défenseur va céder et enchainer le sutemi. Chaque sutemi est également suivi par un contrôle de l’adversaire au sol. Le travail de cette liaison debout-sol peut être pratiquée dans un deuxième temps car reste relativement dangereuse pour le partenaire si le sutemi lui même n’est pas bien maitrisé.
Les 8 sutemi présentés sont les suivants (à noter que les noms peuvent différer d’une école à l’autre…) : Uki Chigae Sutemi, Sumi Gaeshi Juji Jime Sutemi, Ude Maki Sutemi, Tani Otoshi, Uchi Irimi Kata Guruma Sutemi, Kubi Shime Sutemi, Yoko Wakare, Okua Shitori Sutemi.
Vous pouvez bien sûr pratiquer chaque sutemi indépendamment du kata présenté qui reste un kata personnel.
Quelques conseils
– pratiquer à votre niveau, souplement et surtout sur un tatami sous la direction d’un professeur expérimenté.
– pour les pratiquants / professeurs de Nihon Tai-Jitsu, commencez par étudier / enseigner les sutemi spécifiques du programme de notre école, de façon très progressive et conformément au programme pédagogique par ceinture élaboré par Sensei Roland Hernaez (sutemi à partir du programme de ceinture verte, bases sutemi et sutemi de la 4è série du Nihon Tai-Jitsu No Kata Godan) avant de passer au travail de ces sutemi.
– ne pas mettre de force dans l’exécution du sutemi, tout est question de placement du corps (c’est votre poids qui entraine l’attaquant dans sa chute, pas votre force)
– répéter, répéter et répéter encore les techniques, c’est la seule façon pour votre corps d’apprendre et d’acquérir les sensations. L’apprentissage théorique seul ne vous amènera nul part ni en terme d’efficacité, ni dans la voie du Budo…
– une fois les sutemi bien maîtrisés sous cette forme conventionnelle, il vous sera facile de les intégrer de façon fluide et intuitive dans des combats libres, avec plus de déplacements permettant accentuer le déséquilibre du partenaire, car votre corps aura acquis les sensations nécessaires.
– Prenez garde à toujours adapter vos défense au partenaire avec lequel vous travaillez !
– en randori, ne pas faire de sutemi si vous êtes en situation de faire un autre type de défense. En examen de grade ou en compétition, ne pas faire plus de 1 ou 2 sutemi lors de l’épreuve randori; pour un randori de démonstration, qui n’aurait pas pour objectif de présenter le Nihon Tai-Jitsu, vous pouvez en faire autant que vous le voulez pour la beauté du spectacle 😉
Lionel Belcour dit
Merci Maître des ces explications que je n’arrête pas de relire.
Malheureusement cette situation sanitaire nous plombe.
Mon Senseï est Roland RUBENTHALER qui en qui j’ai une totale confiance ainsi que Audrey DEININGER. En espérant revoir le tatami bientôt, j’ai encore l’énergie pour mes 67 ans et j’espère la garder longtemps. Portez vous bien et à bientôt dans cette grande famille.
Philippe Galais dit
Merci pour votre message. Heureux que cette vidéo vous aide. Portez-vous bien également et à bientôt j’espère !